Les deux miterrands
Les conseillers en communication manquent singulièrement d’imagination. Plutôt qu’inventer des modèles de conquête présidentielle, ils copient le passé avec autant de scrupule qu’un revendeur de fausses Marlboro du Métro Barbès.
Tout le monde a remarqué (non sans se moquer) que François Hollande copiait les discours, l’allure et le phrasé de François Miterrand. Il faut dire pour la défense du premier qu’il n’a eu que peu de choix, ce dernier étant comme on sait le seul socialiste à devenir président dans cette cinquième république (qu’il n’aimait guère, d’ailleurs). Reproduire le schéma vaudrait ainsi mieux qu’échouer, même s’il faut pour en arriver là se contraindre à des exercices assez contraignants, qui doivent ressembler à mon propre travail de « présidentialisation ».
Mais Nicolas Sarkozy n’a guère plus de choix. Qu’a t-il à sa disposition, comme exemple de président en exercice qui renouvelle son mandat ? On écarte bien évidemment Valéry Giscard d’Estaing en 1981, l’échec à ne pas suivre. De Gaulle en 1965 ? Difficile, le contexte politique, économique et même médiatique de l’époque est bien différent. De plus le général possédait un certain charisme militaire allié à la résistance impossible à reproduire. Enfin, se réclamer du Gaullisme est devenu avec le temps assez banal, et la concurrence est rude sur ce terrain là.
L’expérience de Chirac en 2002 est aussi à écarter. On sent la tentation de faire monter le Front National pour éliminer le concurrent socialiste, mais l’effet de surprise ne peut plus jouer. Un socialiste averti en vaut deux, François Hollande ne laissera jamais autant de candidats de gauche lui faire concurrence que Lionel Jospin, et de son côté, l’électeur surveillera de près les intentions de vote, quitte à modifier la sienne pour garantir la présence d’un gauchiste au deuxième tour, même s’il se rapproche trop du centre à son goût. Le danger, enfin, d’éliminer Nicolas Sarkozy du deuxième tour de 2012 n’étant pas à écarter, ce scénario devient de moins en moins d’actualité.
Reste un dernier exemple, celui de… François Miterrand. En 1988. Etant déjà président, n’ayant comme adversaire au mieux qu’un premier ministre (ce que François Hollande n’a pas même eu la chance d’être), la réélection va de soi, n’est même pas discutable, puisque personne ne fera jamais plus président que LE président en exercice.
Voilà donc Nicolas Sarkozy retardant au maximum l’entrée en campagne électorale, multipliant les réunions avec les chefs d’Etat voisins, imposant des réformes qui ne verront pas leur application avant des années, s’offrant même le luxe de se tromper lors de ses vœux à propos de la date des élections. Pourquoi serait-il concerné par une élection présidentielle ? Il EST président.
Lequel des deux Miterrands gagnera ? Celui de 1981, singé par François Hollande, ou celui de 1988, singé par Nicolas Sarkozy ? Avons-nous, en 2012, encore besoin d’un Miterrand, quel qu’il soit ? Copier du vieux n’offre-t-il pas un boulevard à un troisième candidat, enfin moderne, qui dépassera les deux premiers ?
Parions sur moi.
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